Lundi 7 février Un devoir de mémoire
Ce lundi 7 février, une plaque commémorative a été posée à la maison des esclaves de l’Ile de Gorée au nom de la CGIL (Italie), de la CGT, de la FGTB (Belgique) des CC.OO. (Espagne), de la CUT (Brésil) et d’organisations de solidarité internationales. Jean Michel Joubier, pour la CGT, est intervenu pour se féliciter de ce geste, à l’initiative de la CGIL, qui témoigne de la volonté du mouvement syndical, 163 ans après l’abolition de l’esclavage en France, d’agir pour la défense des libertés, des droits des travailleurs, du travail décent et de la paix. C’est, pour la CGT, une façon de réaffirmer sa volonté d’agir ensemble pour la construction d’un autre monde.
3e jour
La lutte des travailleurs sans papiers s’invite à Dakar
Une lutte portée par des syndicats unis
Le stand de la Cgt réinstallé (tous les soirs, l’exposition est démontée, ramenée à l’hôtel et remontée le lendemain matin), les « flyers » en main, les militants ont été annoncé à l’entrée principale du Forum social mondial, l’atelier organisé par la Cgt avec la participation de la Cfdt, de Solidaires et de la Fsu sur le thème « des coopérations syndicales pour la défense des droits des migrants ». L’endroit où devait se tenir le débat n’ayant pas fait l’objet d’une publication dans le programme du Forum la veille et malgré ces conditions, il y avait beaucoup de monde sous la grande tente.
En introduction la Cgt a fait un rapide rappel des moments forts de la lutte des travailleurs sans papiers en France à partir des objectifs fixés dans la lettre au Premier ministre du 1er octobre 2009 par les onze organisations syndicales et associations. Insistant sur le fait que cette lutte engagée en particulier depuis le 12 octobre 2009, était très concrètement estampillée syndicale vu que les 6804 migrants grévistes revendiquaient des conditions de régularisation pour l’ensemble des travailleurs et travailleuses sans papiers en France.
La Fsu souligna que cette lutte avait déjà permis de changer le regard porté par la population en France sur ces salariés et Solidaires insista sur le contexte notamment de « l’acte II » où la régularisation par le travail, via « l’article 40 », ouvraient un « axe supplémentaire » dans les possibilités de régularisations.
De son côté le représentant de la Cfdt, tout en saluant l’engagement de la Cgt dans ce combat indiqua que c’était une bataille qui démarrait. Qu’en accueillant les migrants dans leurs permanences, ils militaient pour que tous les travailleurs soient traités de la même façon.
Même si quelques participants à cet atelier voulaient à tout prix rouvrir, ici à Dakar, le débat sur les objectifs de la grève et la stratégie syndicale engagée, l’ensemble des participants à travers les différentes interventions et réponses aux questions posées ont découvert ou redécouvert l’importance politique de cette lutte menée en France par « le collectif des Onze » aux côtés des travailleurs migrants.
Le représentant de l’association des maliens expulsés (AME) est intervenu pour soutenir l’action des organisations syndicales françaises et proposer un renforcement de la coopération avec la Cgt. Rendez-vous a été donné à tous les participants pour poursuivre la réflexion le lendemain au même endroit autour de la question du renforcement de la coopération des organisations syndicales du nord et du sud sur le thème.
Le mouvement syndical dans le processus du forum social mondial
En organisant un atelier s’interrogeant sur l’opportunité pour le mouvement syndical de continuer à participer au processus des forums, la CSI (Confédération Syndicale Internationale) pensait ouvrir une boite de pandore que les organisations syndicales présentes à Dakar se sont empressées de refermer. « il n’y a pas d’autre lieux de convergence que les forums sociaux et l’on ne peut se passer de ces convergences. » (CGIL – Italie) « le Fsm c’est le soutien de la société civile, notamment de la jeunesse.(UTT –Tunisie) « le Forum est, après la chute du mur de Berlin, le lieu où s’expérimentent les contre offensives au néo libéralisme » (CTA – Argentine) , réclamant par ailleurs un prolongement d’actions avec les ONG pour le prochain G20 « Le Fsm n’a pas nuit à notre résistance syndicale : au contraire, elle l’a favorisé » (CSN – Québec) « la victoire de la démocratie dans notre pays s’est faite par le lien avec la société civile. Ici, nous pêchons par manque de coordination. » (CNTG – Guinée) « nous pensons qu’un autre monde est possible et que, pour le construire, il faut de fortes alliances, notamment avec la jeunesse. C’est à nous d’aller à elle, sans attendre qu’elle vienne à nous. » (UGT-Brésil) « Sortir de la crise ne sera pas l’affaires des seules organisations syndicales. Il nous faut rassembler dans les mobilisations et le Forum y aide car nous y rencontrons la diversité »(CCOO- Espagne) « depuis 2001 ; nous avons pu contenir la vague du libéralisme, stabiliser certaines forces, des mutations ont pu émerger ; le Fsm y a aidé , il faut poursuivre la globalisation des résistances. » (USAS Sénégal)
Se demander s’il faut y participer est une mauvaise question. La bonne question c’est comment y participer : il faut discuter avec les étudiants, les femmes, les verts, tous ceux qui veulent changer le monde ; il nous faut débattre de tous les enjeux »
Dans ce débat, la CGT a rappelé la place sans cesse croissante du mouvement syndical dans la construction du Forum Social Mondial (celui de Dakar marquant néanmoins un net recul d’animation par rapport aux précédents), soulignant que l’alliance du mouvement syndical avec le tissu associatif et ONG avait permis d’enfoncer des coins. « Même si leurs réponses ne sont pas les nôtres, nous avons obligés le G20 et Davos à se pencher sur des problématiques qu’ils n’auraient jamais abordés si le FSM n’avait pas existé : la pauvreté, la taxation financière, le travail décent… ». La construction d’un autre monde est possible : mais elle passe par une alliance des expertises syndicales avec celles de la société civile
Plus ou moins soumis à la critique pour le manque d’impulsion et de coordination, la CSI a enregistré les prises de position qui ont toutes plaidées en faveur d’une place grandissante du mouvement syndical dans le processus de construction et d’animation du forum social mondial
4e jour
La défense des droits des migrants passe par une coopération syndicale Nord/Sud renforcée
L’atelier du 4e jour bien qu’annoncé au programme du Forum dans un des amphithéâtres a eu lieu, lui aussi sous la grande tente verte de la CGT. Il avait pour thème la collaboration syndicale Nord Sud pour la défense des droits des migrants. A la « tribune » un camarade de la Confederazion generale italiana del lavoro (Cgil), de la confédération syndicale des travailleurs maliens (Cstm), de la Cgt de Mauritanie (Cgtm), de la Confédération syndicale des travailleurs du Bénin (Cstb) , de la Confédération des syndicats autonomes (Csa-Sénégal), de la Fsu et un camarade de la Cgt France de l’espace europe-inter de la confédération. .
Le camarade Mamadou de Mauritanie a expliqué qu’avec le caractère limité du marché du travail dans son pays, l’immigration était une nécessité pour toute une partie de la jeunesse. En outre, du fait de la fermeture de la frontière entre le Maroc et l’Espagne, son pays était devenu un pays de transit pour nombres de migrants. Ce qui a amené sa centrale à créer une maison des migrants alors que le gouvernement mauritanien était en train de calquer sa politique migratoire sur celle de la France et de l’Espagne. D’un point de vue du travail syndical, il fallait arriver à gagner la confiance de tous ces migrants et défendre leurs droits et notamment mener campagne pour faire ratifier par les Etats les conventions de l’OIT.
Pour Mamadou du Mali, il n’y avait pas de solutions pour arrêter ce phénomène de l’immigration et le mouvement syndical devait s’en préoccuper. Au Mali, ils travaillaient avec les CCOO d’Espagne pour la création de projets afin de « fixer » les migrants.
Monique du Bénin interviendra pour demander un renforcement de la coopération entre les centrales du Nord et du Sud sur cette question. Abdou de la Cgil dénoncera la politique de son gouvernement en la matière et indiquera qu’ils avaient développé le principe de la double appartenance syndicale pour les migrants avec leurs syndicats des pays d’origine.
Mamadou Diouf de la Csa, expliqua qu’ils avaient décidé d’élargir le champ de la syndicalisation à ce secteur, en créant le « collectif sénégalais des travailleurs expulsés » au sein de la centrale. Il est aussi intervenu pour demander que les centrales syndicales procèdent à une analyse approfondie des accords de réadmission passés entre les gouvernements des pays du Sud et ceux du Nord, notamment avec la France. Qu’il fallait faire attention à ne pas tomber dans le piège des listes de métiers proposées à la signature lors de ces accords. Et que tout un travail de réflexion et de mobilisation restait à faire autour des droits à la protection sociale des migrants. Dans le débat Moussa de la CgtB du Burkina Faso appuiera longuement ce dernier point.
Dominique de la Fsu, fera part de l’engagement de sa fédération aux côtés des migrants notamment lors de la campagne de Resf pour les parents et les enfants scolarisés et aux côtés d’autres organisations syndicales et associations pour la régularisation des travailleurs sans papiers. Elle réaffirmera que pour son organisation, l’immigration est une richesse.
Pour la Cgt, à partir de la lutte des travailleurs sans papiers pour leur régularisation, Olivier insistera sur le fait que nous pensons que ces questions relatives à la migration devaient être portées avec nos partenaires des pays du Sud. La volonté de la Cgt est de dépasser les pratiques de simples coopérations entre centrales syndicales du Nord et du Sud pour aller vers la définition et la mise en œuvre d’axes revendicatifs. S’il faut dénoncer la politique des multinationales y compris françaises dans les pays du Sud qui portent aussi une responsabilité dans les causes de la migration, en même temps il faut se mobiliser pour la défense des intérêts individuels et collectifs de ces travailleurs. À ce titre on peut regretter qu’il n’y ait pas eu d’expression commune lors de la signature des accords de réadmission avec la France.
Pour notre part nous sommes favorables à une campagne pour la ratification par le gouvernement français des conventions de l’Oit.